Refugiés : à Cergy, les autorités veulent montrer un nouveau visage
Charles Thiefaine et Pierre Duquesne
Mercredi, 9 Septembre, 2015
« Welcome in
France. We are happy to see you » lance un bénévole du secours catholique d’un accent quelque peu franchouillard. Une véritable politique d’accueil des migrants semble enfin avoir été enclenchée, ce mercredi 9 septembre, à Cergy, dans le Val d’Oise.
47 réfugiés syriens et irakiens dont 12 mineurs et deux nourrissons ont été accueillis à Cergy, dans le Val d’Oise. A cette occasion, un large et exceptionnel dispositif a été déployé dans la verdoyante base de loisir de la ville. Pompiers, policiers sans uniformes, traducteurs, des associations telles que la Ligue des droits de l’homme, la Cimade, le Secours Populaire, la Croix Rouge, Première Urgence Internationale, des responsables de l’Education nationale, ainsi que des représentants de l’agglomération de Cergy et des responsables de la préfecture étaient présents à l’arrivée. Tout un petit monde s’est mobilisé pour les accueillir. Quand la volonté politique est au rendez-vous, notre pays peut montrer un beau visage, celui d’une France accueillante et généreuse. Le service de com’ du ministère de l’intérieur était présent pour assurer cette belle image, devenue rare ces derniers mois.
A bord du bus en provenance de Munich, une équipe de la Croix rouge a assuré le trajet. « Nous sommes partis à minuit et avons procédé à un accompagnement sanitaire des réfugiés durant tout le voyage »explique l’un d’eux. Une fois le pied en
France, ils sont immédiatement pris en charge. Dans une petite salle, plusieurs bureaux sont disposés pour accélérer leur dossier. Le Secours Populaire Français recense les besoins en vêtements et les tailles des réfugiés. Deux femmes de la préfecture du Val d’Oise aident à la compréhension des procédures administratives à suivre jusqu’à l’obtention du droit d’asile. Une assistance psychologique est également prévue par des équipes de CMU 95. « Nous les accompagnons dans la verbalisation », souligne un médecin. L’ONG Première Urgence Internationale évaluer la situation pour chacun d’entre eux. « Combien de temps avez-vous mis pour venir ? Que voulez vous faire ? Avez-vous besoin de soins particuliers ? »
Ils ont eu de la chance. La dizaine d’Erythreens et de Soudanais, dormant depuis plusieurs semaines dans le Formule 1 de Cergy, après avoir été évacués il y a plusieurs mois des rues du quartier de la Chapelle, n’ont pas bénéficié dumême comité d’accueil.
A une table voisine, trois femmes accueillent la famille Abdelaye derrière un écriteau Education nationale. Membres du Centre académique pour la scolarisation des enfants nouvellement arrivés (Casnav) elles informent rapidement qu’Ali, le plus jeune fils âgé de 15 ans, intégrera rapidement en classe de troisième. « Il sera avec des camarades de son âge, et apprendra très vite la langue », assure l’une d’entre elles. Ali sera placé plusieurs heures avec un professeur pour apprendre le français plus rapidement.» « Et pour nous ? Nous voulons aussi apprendre le Français », interroge alors sa sœur, avec l’impatience de ses 20 ans.
« La
France, ça fait rêver, ne peut s’empêcher de dire Choujaa, son autre frère. C’est le pays de la mode, et du luxe », explique le jeune homme, tailleur et couturier dans sa région de Diyala, en Irak. Il y a quelques heures encore, il n’avait aucune idée de sa destination finale. Comme beaucoup d’autres. « Ils sont perdus, et arrivent ici un peu par hasard, glisse un traducteur de l’ONG Première urgence. Certains demandent même s’ils sont loin de la tour Eiffel, leur seul point de repère.
« Ici, c’est toujours mieux que de là où l’on vient », raconte Amjad, attendant la visite médicale. A ses côtés, un autre réfugiés a son bras entièrement bandé. Ce ne sont pas les stigmates de la guerre, des chemins dangereux pour franchir la frontière turque, ni de la traversée de Bodrum jusqu’à l’île de Kos, en Grèce. « Ce sont les policiers hongrois. « Ils sont très violents », confirme Amjad. Lui aussi a été arrêté en Hongrie. « Nous avons été enfermés pendant six jours. On nous avait mis à 25 dans des salles trois mètres sur cinq, avec l’interdiction de bouger. Sans nourriture, ni eau. » Puis après un silence : « je ne suis pas un criminel », ajoute ce prothésiste dentaire, parti il y a 37 jours de Bagdad. Il a marché de la Grèce jusqu’à la frontière autrichienne. Pour arriver à Cergy. « Mais le pire, ce fut la mer », ajoute reprend Chouja. Il n’en dira pas plus. Il est exténué, et ne veut qu’une chose, se reposer.
Dans une pièce voisine, c'est l'effervescence. Certaines familles ont demandé à laver du linge.Ni une, ni deux, le directeur et la collectivité de Cergy s'organisent pour installer une machine ou organiser des convois vers une laverie. La puissance publique peut être d’une efficacité redoutable pour accuillir des migrants. Quand elle l'a décidé.
Enfin les réfugiés effectuent une rapide visite médicale avant de rejoindre leur chambre. Sous le feu des medias et encadrés par un dispositif impressionnant, les réfugiés sont soulagés. « J’étais anxieux sur le trajet. Maintenant je suis rassuré par l’accueil mais je suis toujours inquiet pour ma famille».