Loi de Finance 2019 : Macron frappe la jeunesse et supprime l’aide à la recherche du premier emploi En 15 ans, la situation des jeunes diplomés s’est considérablement fragilisée, à mesure que les différentes lois faisant voler en éclat le code du travail les condamnent à la précarité : le taux de chômage des jeunes diplômés a doublé entre 2001 et 2016, passant de 5 à 10% selon le Centre d’Observation de la société. 18% des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur ne trouvent pas d’emploi un an après leur entrée sur le marché du travail,selon le Baromètre APEC 2017
par les jeunes communistes des JRCF
Loi de finances 2019 : l’aide à la recherche du premier emploi (ARPE) supprimée Dans le projet de loi de finances pour le budget 2019, le gouvernement Philippe supprime l’aide à la recherche du premier emploi (ARPE) au profit d’une aide à la mobilité Parcoursup. Les JRCF dénoncent la régression sociale de cette mesure, qui non seulement supprime une aide sociale à destination des jeunes diplômés, mais se targue en plus d’un motif faussement progressiste : celui d’une cynique « mobilité » des étudiants.
Une fois de plus le gouvernement Philippe s’en prend à la jeunesse, fraction pourtant la plus précaire de la population (26% des moins de 30 ans vivent sous le seuil de pauvreté en France selon l’INSEE 2015). Cette fois, c’est dans le dispositif d’aide à la recherche d’un premier emploi (ARPE) que les ministres de l’austérité budgétaire ont décidé de tailler à l’occasion de la loi de finances pour l’année 2019. Ce dispositif permet aux jeunes de moins de 28 ans de bénéficier d’un prolongement de l’allocation de leur bourse étudiante d’une durée de quatre mois après l’obtention de leur diplôme[1].
Et pour cause, les statistiques montrent que les jeunes diplômés sont plus souvent au chômage que ceux présents depuis plus longtemps sur le marché du travail. En 2016, parmi les actifs récents qui ont terminé leur formation initiale depuis 1 à 4 ans, 20% sont au chômage contre 8% pour ceux ayant plus de dix ans d’ancienneté sur le marché du travail[2]. Rappelons que ces jeunes diplômés sont d’autant plus vulnérables qu’ils arrivent sur un marché du travail « flexibilisé » par les lois Macron, El Khomri et les ordonnances Pennicaud-Macron de 2017. C’est désormais dans le cadre de contrats précaires : stages, intérim, contrats à durée déterminée, et avec un droit du licenciement réduit à la portion congrue, que les jeunes travailleurs vendent leur force de travail sur un marché totalement asymétrique. Cette précarité ne fait que retarder la stabilisation de nos jeunes adultes et leur capacité à se projeter vers l’avenir en ayant « une situation » ; expression dont la désuétude ne révèle que trop le climat d’insécurité sociale dans lequel les jeunes générations grandissent.
les jeunes diplômés, fragilisés par la précarisation des emplois, privé d’aide
Par ailleurs, la réforme Parcoursup aura des conséquences à long terme sur l’endettement des jeunes diplômés. La sélection à l’université a d’ores et déjà commencé à créer une véritable aubaine pour les écoles supérieures privés – vers lesquelles les candidats déboutés de leurs vœux se tournent, bon gré mal gré, – et les établissements financiers qui proposent des prêts étudiants pour les financer. Cette hausse du coût des études concerne également l’université publique avec l’augmentation progressive mais non moins sensible des frais d’inscription depuis la loi dite « d’autonomisation des universités » (comprendre privatisation par étapes). C’est donc pieds et poings liés par la dette étudiante, et sur un marché du travail dérégulé, que les jeunes diplômés sont censés s’insérer.
Le gouvernement excipe du fait qu’il ne s’agirait pas d’une suppression pure et simple d’une aide sociale étudiante mais d’un transfert de ce budget vers une aide à la mobilité des étudiants dans le cadre de la procédure nationale de préinscription à Parcoursup. Une fois de plus, la rigidification des conditions de travail et d’études doit se faire au prix de la « mobilité » des étudiants.
De la mobilité choisis à la migration forcée : sois jeune et tais toi !
Derrière ce mot de mobilité, apparemment neutre, se cache une véritable injonction révélatrice de la dimension spatiale des inégalités. La possibilité de choisir ses déplacements et de ne pas les subir devient ainsi un enjeu de lutte des classes. Les discours lénifiants sur la mobilité, la libre circulation des hommes, des marchandises et des capitaux masquent trop mal la contrainte, voire la violence (cf la crise migratoire actuelle), des déplacements forcés par le mode de production capitaliste à son stade actuel.
Ainsi, en lieu et place d’une aide au demeurant bien insuffisante à l’insertion des jeunes diplômés dans le monde du travail, le gouvernement régressif d’Edouard Philippe propose de lui substituer une aide à la mobilité « Parcoursup » qui ressemble plus à un pis-aller qu’à une véritable aide sociale. En effet cette aide dont le montant oscille entre 200 et 1000 euros paraît dérisoire au regard des coûts qu’impliquent l’installation d’un jeune étudiant loin de sa région géographique d’origine.
Les JRCF dénoncent cette énième régression sociale du programme macronien, et des directives de l’UE, de destruction des conquis sociaux.
[1]http://www.etudiant.gouv.fr/cid104954/jeune-diplome-disposant-de-faibles-ressources-demandez-l-arpe.html
[2]https://www.insee.fr/fr/statistiques/3526080?sommaire=3526086&q=jeunes
Loi travail. Le besoin d’un autre texte : la preuve par trois
Sévèrement dénoncée pour les conditions de travail de ses salariés, Amazon deviendra-t-elle un modèle ?
« Démocratique, créatrice d’emplois et moderne », voilà comment les tenants de la loi travail, à commencer par le gouvernement et le patronat, vendent le texte à l’opinion publique. Preuve qu’ils ont bien cerné quelles sont les attentes quant à une vraie loi travail... Mais ils font tout pour les dévoyer !
1 « Plus démocratique »
« Un nouvel élan pour la démocratie sociale. » C’est ainsi que la ministre du Travail, Myriam El Khomri, qualifie le projet de loi. Cet élan reposerait sur deux piliers : la primauté de l’accord d’entreprise et l’usage du référendum.
À chacun ses règles
Parce qu’il permet de négocier « au plus près des travailleurs », l’accord d’entreprise serait le nec plus ultra de la démocratie. Depuis les années 1990, les négociations à ce niveau se sont beaucoup développées, aboutissant à 36 500 accords signés en 2014. Mais ces accords doivent en principe être plus favorables pour les salariés que la convention collective de la branche, qui elle-même doit être plus favorable que la loi. Depuis 30 ans, ce principe a subi quelques accrocs en matière d’aménagement du temps de travail. La loi Fillon de 2004 a même autorisé un accord d’entreprise à instaurer des dispositions moins favorables aux salariés que celles de la convention collective. Mais uniquement lorsque la convention collective ne l’interdit pas explicitement.
L’actuel projet de loi (article 2) fait sauter ce verrou. En matière de durée du travail et de rémunération des heures supplémentaires – pour commencer –, c’est l’accord d’entreprise qui fixerait la norme. De quoi engendrer autant de règles que d’entreprises, selon le rapport de forces dont disposent les syndicats. Et offrir aux entreprises un outil supplémentaire de dumping social – la convention collective permet au contraire une unification des conditions de travail dans un même secteur d’activité. Quels contrôles pourraient opérer les inspecteurs du travail dans un tel maquis ?
Le référendum, qui dit mieux ?
Selon le projet de loi, pour être valide un accord d’entreprise devrait être signé par un ou plusieurs syndicats représentatifs ayant recueilli 50 % des suffrages exprimés lors des élections professionnelles (contre 30 % aujourd’hui, avec possibilité pour ceux ayant recueilli au moins 50 % de faire jouer leur droit d’opposition). Mais le patron aurait une chance au grattage et une autre au tirage. Si les syndicats majoritaires sont opposés à l’accord, il lui suffirait d’obtenir l’aval d’organisations représentant au moins 30 % des suffrages et de faire valider le texte par référendum. Pourquoi avoir peur du vote des salariés, s’étonnent les promoteurs du projet ? Parce que l’entreprise capitaliste n’a rien d’une communauté de citoyens égaux en droit. Chaque salarié est assujetti à son employeur par un lien de subordination, et soumis aux ordres de sa hiérarchie. Contourner les syndicats, dont les représentants bénéficient, heureusement, d’un minimum de protection face au licenciement (nécessité d’obtenir l’autorisation de l’inspection du travail) n’a rien de démocratique.
2« Créatrice d’emplois »
Le projet de loi viserait à assouplir un Code du travail particulièrement rigide, handicap pour la « compétitivité » des entreprises et « frein à l’embauche ». Cibles privilégiées : les 35 heures et la difficulté à licencier.
35 heures, une réalité sur le papier
37,3 heures, c’est le temps de travail hebdomadaire moyen en France, en 2015. Contre 38 heures en 2005. Mais ce chiffre cache des disparités. Depuis cette date, les travailleurs non salariés sont passés de 55,1 à 51,2 heures ; les salariés à plein temps de 37,7 à 39,1 heures, et les salariés à temps partiel de 23,2 à 22,9 heures. Les 35 heures ne sont donc pas un « carcan » ! Depuis leur instauration, il est possible d’y déroger. L’annualisation du temps de travail mise en place avec la loi du 12 mars 1999 permet en effet de répartir les 1586,55 heures de travail tout ou long de l’année suivant les aléas de la production. Certaines entreprises à l’activité saisonnière en sont les championnes. Ainsi les fabricants de glaces alimentaires embauchent en CDI à temps partiel annualisé et font travailler au-delà de 35 heures par semaine l’été et lors des fêtes sans payer d’heures supplémentaires, et quelques heures seulement en période de basse consommation. Quant aux cadres, le forfait jours permet de les faire travailler jusqu’à 218 jours par an et 10 heures par jour. Enfin, la loi prévoit déjà de ramener de 25 à 10 % le taux de majoration des 8 premières heures supplémentaires.
Licencier, c’est pas cher
Impossible de licencier en France ? En 2015, 612 700 personnes ont été licenciées (pour 23,8 millions de salariés). Seuls 15 % des licenciements ont un motif économique. 85 % ont pour prétexte une faute du salarié ou un motif personnel. Aux licenciements, il faut ajouter 315 000 ruptures conventionnelles, de soi-disant séparations à l’amiable de l’employeur et du salarié. Contrairement aux idées reçues, licencier ne coûte pas cher. En cas de faute considérée comme « grave » ou « lourde », le salarié ne touche aucune indemnité. Quand il en touche une – en cas de licenciement à titre personnel pour « cause réelle et sérieuse » (dont faute légère), de licenciement économique ou de rupture conventionnelle –, l’indemnité légale de base est ridicule. Un cinquième du salaire brut mensuel par année d’ancienneté, majorée de deux quinzièmes de salaire brut mensuel au-delà de 10 ans d’ancienneté, selon le Code du travail. Un smicard qui touche 1 466 euros brut par mois, aura ainsi 293,20 euros d’indemnité de licenciement par année d’ancienneté et 195 euros de plus par an au-delà de 10 ans d’ancienneté. Les conventions collectives les plus protectrices, comme celles des journalistes de la presse quotidienne nationale, accordent un mois de salaire brut par année d’ancienneté dans la limite de 15 années d’ancienneté. Enfin, contrairement à ce qu’affirme le patronat, peu de licenciements, moins de 5 %, font l’objet de contestation devant les prud’hommes.
3 « Plusmoderne »
C’est l’argument massue des défenseurs de la loi El Khomri : la France doit adapter son marché du travail aux « réalités » du monde contemporain. Et « ça marche ailleurs » ! Sous prétexte de réduire les déficits publics, les gouvernements européens ont en effet accéléré les mesures dites « structurelles » : flexibilisation du marché du travail ; décentralisation de la négociation collective au niveau de l’entreprise ; baisse du « coût » du travail et pression sur les demandeurs d’emploi.
Le « miracle » italien
En Italie, le Jobs Act, porté par le premier ministre, Matteo Renzi, a été adopté en 2014. Il prévoit la suppression de l’article 18 du Code du travail permettant une réintégration du salarié en cas de licenciement abusif ; et la création du nouveau contrat à durée indéterminée à « protection croissante » : en clair, le salarié peut être viré d’un claquement de doigt pendant les 3 premières années suivant l’embauche, avec indemnités de licenciement croissantes selon l’ancienneté. De prime abord, la réussite est foudroyante. Entre janvier 2015 et janvier 2016, le nombre de salariés en CDI a fortement progressé (+ 328 000), le rythme annuel des créations d’emplois a retrouvé son niveau d’avant-crise, le taux de chômage a baissé de 12,8 % à 11,4 %.
Miracle ? Les choses sont plus compliquées ! Le succès des nouveaux contrats à protection croissante s’explique en bonne partie par une carotte fiscale : les cotisations sociales sont allégées pendant 3 ans, dans la limite de 24 000 euros. Un cadeau fiscal à 12 milliards d’euros, qui explique sûrement le soudain appétit des patrons pour les CDI… Par ailleurs, le principe même de ces contrats est de faciliter le licenciement : combien de salariés vont se retrouver à la porte dans les 3 prochaines années ? Quant à la baisse du chômage, elle a été facilitée par la stagnation de la population active.
L’« assouplissement » espagnol
En 2012, le gouvernement de Mariano Rajoy a décidé d’« assouplir » le marché du travail. L’indemnité en cas de licenciement abusif a été réduite de 45 à 33 jours de salaire par année d’ancienneté. Le patron désireux de se séparer de ses employés peut le faire dès qu’il subit des pertes économiques pendant 3 trimestres consécutifs. Et la priorité absolue a été donnée aux conventions collectives négociées dans les entreprises, au détriment des conventions sectorielles ou géographiques (négociées au niveau des provinces).
Pour quels résultats ? Le taux de chômage frôle toujours les 22 %, malgré une baisse de 3 points par rapport à 2013. Quant à la précarité, elle continue d’augmenter. En 2015, près de 70 % des emplois créés sont des contrats précaires (temporaires à temps plein ou à temps partiel). Mais les « coûts » salariaux unitaires, eux, ont chuté de 6 % entre 2009 et 2014. La flexibilisation, ça « marche » surtout pour les patrons…
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